Construire un nouveau service public de la petite enfance

Publié le 02/12/2022 Temps de lecture : 6 minutes

Priorité du Gouvernement, le service public d’accueil du jeune enfant a connu des avancées lors du précédent quinquennat. Toutefois, beaucoup de parents peinent encore à trouver un mode d’accueil financièrement accessible, de qualité et correspondant à leurs besoins (horaires atypiques, accueil à temps partiel etc.) et à ceux de leur enfant (par exemple, enfants en situation de handicap).

Des inégalités d'accès aux gardes d'enfant

En dépit de financements publics importants (15,3 milliards d'euros en 2019), l’accueil des jeunes enfants demeure marqué par de fortes inégalités sociales et territoriales. Ainsi, parmi les femmes qui déclarent être inactives ou travailler à temps partiel pour s’occuper d’un enfant ou d’une personne dépendante, respectivement 21 % et 17 % d’entre elles le sont pour des raisons liées au manque de services de garde ou à leur coût. Par ailleurs, un enfant sur deux ne fréquente aucun mode d’accueil en dehors de son cercle familial, le plus souvent des enfants en situation de pauvreté.

Rendre l'accueil individuel plus accessible

Parmi les problématiques identifiées, l’accueil individuel (c’est-à-dire l’accueil par les assistants maternels ou par une garde d’enfant à domicile) reste aujourd’hui trop peu accessible pour les ménages modestes, et en particulier parmi eux les familles monoparentales, alors même qu’il s’agit du mode d’accueil le plus répandu (55 % de l’offre d’accueil en 2019 selon la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)).

Afin d’y remédier, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 prévoit plusieurs mesures d’évolution du complément de libre choix du mode de garde (CMG), prestation familiale qui solvabilise la garde formelle d’enfants de moins de six ans avec :

  • L’évolution du mode de calcul du CMG pour rapprocher le reste-à-charge des assistants maternels avec celui des crèches en 2025 ;
  • L’extension du bénéfice du CMG jusqu’aux 12 ans de l’enfant (contre six ans auparavant) pour les familles monoparentales.

L’objectif est de permettre à ces familles de mieux concilier leurs temps de vie professionnelle et personnelle avec leurs responsabilités familiales et de favoriser leur accès ou leur maintien dans l’emploi.

Garantir aux parents une solution d'accueil pour leur enfant de moins de trois ans

Dans son discours de politique générale, la Première ministre a annoncé vouloir construire « un véritable service public de la petite enfance » avec les collectivités territoriales, afin « d’offrir les 200 000 places d’accueil manquantes ».

Au-delà de l’objectif quantitatif et de l’objectif historique en matière de conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, le service public de la petite enfance devra répondre au double objectif d’une offre :

  • De qualité, au service du développement de l’enfant et de son épanouissement ;
  • Financièrement accessible, notamment pour les ménages modestes.

La mise en place de ce service public se matérialisera dans la négociation de la prochaine convention d’objectifs et de gestion entre la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) et l’État afin de lever les freins financiers des collectivités territoriales au développement de places d’accueil et de concourir à l’amélioration des conditions d’accueil, au service des familles et des professionnels.

Élisabeth Laithier, présidente du comité de filière petite enfance et rapporteure générale de la concertation, présente le service public de la petite enfance 

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Quel est l'objectif du service public de la petite enfance ?

Le service public de la petite enfance répond à trois ambitions.

  • Première ambition : garantir à toutes les familles une information qui soit fiable, qui soit juste, qui soit actualisée, Ensuite, les accompagner dans le suivi de leurs demandes, et pour toutes les familles auxquelles on ne peut pas répondre, être à leurs côtés pour essayer de trouver des solutions adaptées.
  • Deuxième ambition : garantir un nombre de places d'accueil qui soit suffisant, que ce soit de l'accueil collectif ou de l'accueil individuel, pour répondre aux besoins de toutes les familles.
  • Et la troisième ambition, c'est la qualité de l'accueil. Une qualité d'accueil qui soit identique quel que soit le mode d'accueil utilisé.

Pour les modes d'accueil du jeune enfant, qu'est-ce qui existe aujourd'hui ?

L'offre d'accueil est déjà importante en France, puisque nous avons 1,3 million de places d'accueil individuelles et collectives. À côté de cela, nous sommes face à trois inégalités :

  • Première inégalité : une inégalité territoriale. 12 départements ont moins de 50 places à offrir pour 100 enfants.
  • Deuxième inégalité : une inégalité financière, en fonction du mode d'accueil.
  • La troisième inégalité : une inégalité sociale. 71 % des enfants appartenant à des familles défavorisées n'ont pas accès à un mode d'accueil quel qu'il soit.

Quelles sont les difficultés auxquelles il faut faire face ?

Première difficulté, grosse difficulté, c'est la problématique des professionnels et de la désaffection. Aujourd'hui, pour les métiers de la petite enfance, quels qu'ils soient, nous estimons que 10 000 professionnels manquent auprès des enfants. Quant aux assistantes maternelles qui assurent l'accueil individuel, le premier mode d'accueil en France, elles sont aujourd'hui approximativement 240 000 en exercice. À l'horizon 2027-2030, la moitié sera partie en retraite.

Les difficultés de l'État, c'est en fait de coordonner les très nombreux acteurs qui œuvrent dans ce secteur.

Les communes, elles, sont confrontées à trois types de difficultés majeures :

  • Tout d'abord, bien évidemment, des difficultés financières,
  • Des difficultés également sur le foncier.
  • La troisième difficulté : l'ingénierie, parce qu'effectivement, un certain nombre de communes et de petites communes, entre autres, n'ont pas à leur disposition des services qui peuvent les aider dans l'élaboration d'un schéma d'accueil de la petite enfance.

Pouvez-vous nous parler de ce CNR qui travaille sur le thème du service public de la petite enfance ?

Nous ne partons pas d'une page blanche. Le but de cette concertation territoriale est de se rendre dans toutes les régions de France pour, au final, avoir une représentativité la plus juste possible de notre pays.

Le second objectif de la consultation, c'est également d'identifier des dispositifs qui sont mis en place et qui ont fait leurs preuves.

Le service public de la petite enfance sera co-construit avec absolument toutes les parties prenantes.

Quelles sont les conditions de réussite de ce projet ambitieux ? 

Quatre conditions :

  • La première, bien sûr : remédier à la pénurie de professionnels.
  • Seconde condition pour que ce projet aboutisse, c'est clarifier le rôle et les compétences de chacun des acteurs, l'État, les régions, les départements, les collectivités... que ce soit vraiment extrêmement clair.
  • Troisième condition pour les collectivités locales : apporter de nouveaux leviers qui leur permettent d'avoir elles aussi une politique dynamique, ambitieuse, d'accueil du jeune enfant.
  • La quatrième condition, c'est : accompagner. Accompagner le pilotage de la qualité de l'accueil.

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