Sixième vague du baromètre de suivi qualitatif de la pauvreté et l’exclusion sociale du CNLE

Plus de difficultés, moins d’aides et l’accès aux droits comme élément central des problématiques rencontrées

Publié le Mis à jour le 30/06/2025 | Temps de lecture : 4 minutes

Le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) publie ce jour la 6e vague de son baromètre de suivi qualitatif de la pauvreté et l’exclusion sociale (BaPE), couvrant la période de mi-décembre 2024 à mi-février 2025.

Des difficultés qui persistent d’une vague à l’autre du baromètre

Dans cette 6e vague du BaPE, les difficultés remontées par les répondants dans les précédentes enquêtes persistent ou s’aggravent pour des publics fragiles toujours plus nombreux avec des difficultés de différents ordres et souvent cumulatives. Ces situations paraissent inévitables et s’ancrent dans le temps pour les usagers. Sur l’aspect financier, la gestion du budget devient critique, même pour des publics modestes ayant un emploi. La question de l’emploi et de l’insertion prend une place croissante dans cette 6e vague.

L’accès aux droits, une problématique centrale depuis la première vague du BaPE

Depuis la première vague du baromètre du CNLE, les acteurs de terrain alertent sur les difficultés d’accès aux droits, qui se sont installées comme une tendance lourde et persistante. Le CNLE a souhaité dans ce communiqué, faire un focus sur cette question.

À l’hiver 2024/2025, la sixième vague confirme non seulement la persistance de ces obstacles, mais aussi leur généralisation. Certains publics sont particulièrement vulnérables mais ces difficultés concernent désormais un spectre beaucoup plus large, incluant des personnes auparavant relativement épargnées, comme des salariés modestes ou des jeunes en insertion. Les publics dont les difficultés s’aggravent sont ceux régulièrement signalés depuis 2023 : 

  • les personnes en situation de forte précarité, notamment les bénéficiaires de minima sociaux ;
  • les personnes ayant de faibles revenus ;
  • les familles monoparentales ;
  • les habitants en milieu rural ayant des difficultés de mobilité ;
  • les étudiants que les familles ne peuvent pas soutenir financièrement, particulièrement dans l'enseignement privé.

Le phénomène d’« errance administrative » est massivement rapporté : nombre de personnes ne parviennent plus à obtenir de réponse des institutions ou se heurtent à des démarches si complexes et instables (notamment en ligne) qu’elles renoncent. Le développement de l’e-administration, sans accompagnement suffisant, amplifie ces inégalités d’accès, notamment pour un public déjà fragilisé.

Dans de nombreux cas, il existe un profond décalage entre les critères d’attribution des aides et la réalité des besoins des ménages : certains, juste au-dessus des seuils, restent sans soutien malgré des situations critiques. 

Un filtrage informel des publics, au détriment des personnes plus en marge

Généralement, cette distance entre besoins et dispositifs touche l’ensemble des champs. Les domaines particulièrement pointés du doigt par les participants sont le logement et la santé. Déjà lors de la 5e vague du baromètre, les difficultés de logement étaient mises en avant comme obstacle transversal. Ces difficultés, loin de s'atténuer tendent même à se renforcer avec une absence de solutions possibles menant bien souvent à un fort sentiment d'impuissance. C'est également le cas dans le domaine de la santé ou le manque d’offres et des déserts médicaux, notamment, entraînent un renoncement massif aux soins, physiques comme psychiques. 

Les conséquences sont multiples :

  • D’un côté, les dispositifs d’aide sont globalement saturés. Fait nouveau en sixième vague, plusieurs acteurs répondants signalent également la diminution des aides d’urgence qu’ils sont en mesure de mobiliser.
  • De l’autre, les professionnels font face à une pression croissante, souvent sans coordination entre structures associatives, publiques et institutionnelles. 

Cela a un impact sur les publics accueillis qui se retrouvent parfois perdus concernant les bons interlocuteurs ou même sans interlocuteurs du tout. 

Cette pression accrue et cette inadéquation des réponses aboutissent à un filtrage informel des publics qui s’installe peu à peu, où seuls les plus visibles, les plus informés ou les plus accompagnés peuvent encore accéder aux dispositifs, au détriment des plus en marge.

Les phénomènes récents pouvant s’ancrer à l’avenir

Deux phénomènes se dégagent et peuvent constituer des signaux potentiellement inquiétants pour l’avenir :

  • Les demandes de titre de séjours ont été parfois annulées, avec nécessité de recommencer la demande depuis son début : les délais, très longs d’une manière générale, deviennent insoutenables pour des personnes qui n’ont aucune possibilité de s’insérer dans l’attente de leur régularisation.
  • Les transformations à l’œuvre dans le secteur du handicap, avec la disparition de métiers d’accompagnement au profit de plateforme d’orientations : des publics qui jusque-là bénéficiaient d’un accompagnement global, se voient orienter vers des professionnels du secteur libéral, professionnels en nombre parfois insuffisants pour les prendre en charge.

La question de l’accès aux droits fait écho aux différents travaux du CNLE et corrobore l’augmentation du sentiment de pauvreté, abordé notamment dans le Panorama de l’évolution de la pauvreté et l’exclusion sociale du CNLE, publié le 7 mai dernier.

Dans le contexte budgétaire actuel, les difficultés remontées par les répondants risquent fort de ne pas s’améliorer.

Le CNLE est prévu par la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d’insertion, et mise en œuvre avec le décret n° 93-650 du 26 mars 1993 qui définit la composition du CNLE (qui comptait 24 membres), ses missions, son fonctionnement et ses moyens. Aujourd’hui, la moitié des membres du Conseil du CNLE sont des personnes concernées par la pauvreté et l’exclusion sociale.

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