Santé mentale des jeunes : restons à l’écoute

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Périodes majeures dans la construction sociale et identitaire, l’adolescence et l’entrée dans l’âge adulte sont fortement impactées par des changements physiologiques et affectifs ainsi que par les environnements physiques et sociaux dans lesquels les jeunes évoluent. Les jeunes sont globalement en bonne santé et se perçoivent comme tel. Cependant, selon les dernières données de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistique (Drees) et de Santé publique France, un nombre croissant d’entre eux souffrent de troubles anxieux, de dépression ou de pensées suicidaires. Le mal-être potentiellement éprouvé lors de la phase de transition entre l’enfance et l’âge adulte peut être passager mais ne doit pas être ignoré ou négligé pour autant. 

Longtemps tabou, le sujet de la santé mentale s’ouvre peu à peu, libérant ainsi l’écoute de tous les acteurs autour d’eux et permettant une prise en charge dès la manifestation des premiers signaux de détresse. 

Chiffres clés de la santé mentale des jeunes en France

  • 14 % des collégiens et 15 % des lycéens présentent un risque important de dépression (source Santé publique France, 2024)
  • Plus de 50 % des élèves de collèges et lycées présentent des plaintes psychologiques ou somatiques hebdomadaires comme des difficultés à s’endormir, la nervosité, l’irritabilité ou le mal de dos. (source Santé publique France, 2024)
  • Près de 936 000 jeunes ont bénéficié d’un remboursement de psychotrope en 2023, soit +18 % par rapport à 2019. (Source rapport de l’assurance maladie, juillet 2024)
  • Les jeunes âgés entre 15 et 25 ans déclarent avoir une relation nocive, voire toxique, avec leur téléphone portable : 38 % se déclarent addicts et 34 % décrivent leur relation comme négative (Source Ramsay Santé, 2022)

L’adolescence, une phase de transition profonde

L’adolescence correspond à une phase de transition à la fois physique, psychologique, sociale et identitaire. Ce moment charnière entre l’enfance et l’âge adulte confronte les jeunes à de nombreux bouleversements et défis :

  • les changements hormonaux et physiques ;
  • l’évolution de la vie affective ;
  • la construction de l’identité ;
  • l’acquisition progressive d’autonomie et d’indépendance ;
  • la recherche d’intégration sociale et le développement d’amitiés ;
  • la pression scolaire et l’orientation professionnelle.

Réseaux sociaux et santé mentale

Les réseaux sociaux ont été identifiés comme étant susceptibles d’affecter négativement la santé mentale des jeunes, en particulier en présence de vulnérabilités préexistantes. Ils sont notamment susceptibles d’exposer massivement des adolescents à des contenus non adaptés du fait des bulles algorithmiques. Par exemple, les jeunes femmes peuvent être ciblées par des contenus faisant la promotion d’une maigreur excessive. Ces dernières consomment davantage de contenus des réseaux sociaux que le reste de la population. Elles sont 48 % à consulter les réseaux sociaux une fois par heure contre 16 % de la population générale (Source Drees, Etude et résultats n° 1340, 4 juin 2025). 

Le mal-être adolescent ne doit pas être banalisé. Il peut être temporaire, s’il est détecté et pris en charge. Dans certains cas, il peut évoluer vers des troubles psychiques (dépression, troubles des conduites alimentaires, conduites à risque), d’où l’importance de l’écoute, du dialogue et de l’accès à des ressources adaptées (psychologues, maisons des adolescents, etc.).

Combattre les idées reçues sur la santé mentale

Le domaine de la santé mentale inspire de nombreuses idées reçues, souvent négatives et qui nourrissent des attitudes stigmatisantes et discriminatoires. Chez les jeunes, ces discriminations peuvent renforcer le sentiment d’isolement.

Des initiatives permettent de lutter contre celles-ci et nombreuses d’entre elles s’adressent en particulier aux jeunes : le Festival Pop & Psy, le Facettes Festival, les outils pédagogiques de Psycom – Mythes et réalités ou encore les Semaines d’information sur la santé mentale à destination du grand public.

Quels sont les troubles de santé mentale fréquents chez les jeunes ?

Si le mal-être perdure, il se peut que ce soit le signe de troubles psychiques plus importants qu’un simple état passager. Dans ce cas, des soins spécifiques sont nécessaires, avec le soutien et l’écoute de ses proches.

Sans être exhaustive, cette liste présente les troubles de santé mentale les plus fréquents chez les jeunes :

  • La dépression doit être distinguée d’une baisse de moral passagère : perte de plaisirs, de motivation, idées noires, agressivité, irritabilité, tristesse profonde, insomnie, etc.
  • Les troubles anxieux : lorsque la peur ou l’anxiété face à des situations de la vie quotidienne deviennent trop intenses et qu’ils perturbent le quotidien (en générant par exemple des conduites d’évitement de certaines activités, du fait d’aller à l’école, etc.), on parle de troubles anxieux. Ils comprennent le trouble anxieux généralisé (anxiété constante sur plus de six mois), les phobies et les troubles obsessionnels compulsifs.
  • Les troubles des conduites alimentaires : l’anorexie et la boulimie sont les principaux troubles des conduites alimentaires dont souffrent majoritairement les filles, mais aussi les garçons.
  • Les troubles addictifs : l’usage abusif de substances (drogues, alcool, etc.) ou les comportements compulsifs avec les jeux vidéo ou les jeux d’argent par exemple deviennent problématiques lorsqu’ils s’intensifient et ont des répercussions sur la vie quotidienne.
  • Les troubles schizophréniques : ils se caractérisent par une désorganisation de la personnalité et des pensées et peuvent entrainer un décrochage scolaire, l’isolement, etc.
  • Des blessures volontaires telles que les scarifications

Qui consulter en cas de mal-être psychologique ?

Des professionnels à l’écoute :

  • En cas de détresse ou de pensées suicidaires, appelez le 3114 : numéro national de prévention du suicide, accessible 24h/24, 7j/7, gratuit dans toute la France. Un professionnel du soin, spécifiquement formé à la prévention du suicide, sera à votre écoute. Le site 3114.fr fournit également des ressources pour comprendre et surmonter les crises suicidaires.
  • En cas de détresse psychologique ou de difficultés, les professionnels de santé qui vous entourent peuvent être d’une aide précieuse : l’infirmière scolaire, le médecin généraliste, la médecine du travail, etc.
  • Un psychologue peut être consulté, notamment grâce au dispositif Mon soutien psy (remboursement de 12 séances par an et par personne).

Découvrez le témoignage de Marie Rose Moro, chef de service de la Maison de Solenn. Cette structure, au sein du groupe hospitalier de l’hôpital Cochin-Paris, dispense des soins psychiques pour les adolescents de 11 à 18 ans. Il propose également des groupes de paroles pour favoriser l’expression des jeunes en souffrance psychologique.

Marie-Rose Moro, cheffe de service, pédopsychiatre, Maison de Solenn : « La maison de Solenn, c'est un service hospitalo-universitaire de l'hôpital Cochin de la PHP et c'est par ailleurs une des grandes figures des maisons des adolescents en France. On accueille les adolescents et leur famille. On soigne toutes les pathologies qui émergent à l'adolescence. De l'anorexie, la dépression, maladie chronique des adolescents à l'obésité, mais aussi toutes les souffrances qui peuvent arriver, des troubles de la personnalité, des crises familiales.
Nous, on va mettre en place des psychothérapies de toute nature, individuelle, familial, c'est une de nos spécialités. Et on met en place les soins et on les suit jusqu'au bout. »

Témoignages de participantes à un groupe de parole :

  • « Je m'appelle Laura et je me sens la belle au bois dormant parce que je dors tout le temps. »
  • « Moi je m'appelle Kenza et je me sens machine à laver parce que je suis lessivée. J'ai l'impression de tourner en rond. »
  • « Moi je me sens guerrière parce que j'ai l'impression de me battre. 

Marie-Rose Moro : « Tu as raison. »

Marie-Rose Moro : « Les constats sur la santé mentale des adolescents, c'est une augmentation très importante des besoins de santé mentale. La dépression étant la pathologie, la souffrance la plus la plus importante.
Je trouve qu'on exagère beaucoup la question des dangers extérieurs. Les réseaux sociaux, c'est pas eux qui créent la souffrance. Bien sûr, c'est un écho. Si vous vous faites harceler à l'école, si on casse l'écran, la question derrière, elle restera. Il faut pas quand même qu'on se trompe de bataille. »

Témoignages de participants à un groupe de parole :

« On a l'impression, quand on est ici... En fait, quand on sort, il y a plein de choses qui se sont passées mais nous on les a pas vécues. »

« C'est comme si on se réveillait d'un coma. »

« C'est une pause ici, mais une pause de la vie en soi. »

Marie-Rose Moro : « La souffrance psychique, c'est la résultante de toute une série de fragilités qui commence par des choses intérieures, des choses de relations à l'autre, des choses de la famille et du rapport au monde.
Il y a quelque chose quand même qui augmente le poids sur les adolescents, c'est le fait que la société française, elle a une vision très négative de sa jeunesse et elle ne croit pas que sa jeunesse est capable de faire mieux qu'elle. 
Un des grands principes de la détection, c'est le changement dans le comportement. C'est la rupture qui doit nous alerter. 
Le pire pour les adolescents, c'est la solitude. C'est-à-dire qu'il faut des liens avec eux. Le lien, le lien, le lien. C'est la seule chose qui protège. Il faut créer du lien. »

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Des lieux d’accueil à la disposition des adolescents et jeunes adultes :

  • Les maisons des adolescents sont des lieux d’accueil, installés sur l’ensemble du territoire. Ils apportent écoute, informations et conseils pour les adolescents et jeunes adultes de 11 à 25 ans, leurs familles et les professionnels qui les côtoient. Les accompagnements, délivrés par une équipe de professionnels pluridisciplinaires (médecins, éducateurs, psychologues, etc.) sont anonymes, gratuits et sans rendez-vous. Pour trouver la maison des adolescents la plus proche de chez vous, suivez ce lien.
  • Les Points accueil-écoute Jeunes (PAEJ) sont des lieux d’accueil, d’écoute et d’orientation pour les jeunes de 12 à 25 ans et leur famille. Leur rôle est d’apporter soutien et conseils aux adolescents qui rencontrent des difficultés dans leur vie quotidienne : problème de santé, mal-être, souffrance psychique, difficultés scolaires ou relationnelles, échecs, conflits familiaux, etc. Consultez la carte des PAEJ.
  • Les espaces santé jeunes sont des lieux d’écoute, de prévention et d’accompagnement gratuits dédiés aux jeunes entre 11 et 25 ans. Leur objectif principal est de favoriser la santé globale des jeunes, en particulier leur santé mentale, dans un cadre bienveillant, anonyme, gratuit et sans jugement. 
    Consultez la carte des espaces santé jeunes.
  • Les consultations jeunes consommateurs (CJC) sont des lieux d’accueil qui proposent des consultations gratuites et confidentielles au sein des centres spécialisés d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), des maisons des adolescents ou des PAEJ. Elles permettent de faire le point sur l’addiction du jeune qu’elle que soit sa nature : usage d’alcool, de drogues, la pratique de jeux vidéo, etc.
  • Les bureaux d’aide psychologique universitaire (BAPU) sont des structures de soutien psychologique spécifiquement destinées aux étudiants de l’enseignement supérieur, quel que soit leur établissement (université, BTS, école, etc.). Il propose des consultations psychologiques gratuites assurées par des psychologues et des psychiatres. Il existe une trentaine de BAPU en France, souvent situés dans les grandes villes universitaires (Paris, Lyon, Lille, Montpellier, etc.).

Des lignes d’écoute :

  • Le numéro vert et tchat Fil Santé Jeunes (0 800 235 236), un service anonyme et gratuit pour les 12-25 ans, disponible 7j/7 de 9h à 23h.
  • Le numéro national de prévention du suicide 3114, accessible gratuitement 24h sur 24 et 7 jours sur 7 en tout point du territoire national, s’adresse aux personnes en souffrance psychique, à leur entourage et aux professionnels qui les accompagnent. Ce service est assuré par des professionnels du soin, infirmiers ou psychologues spécifiquement formés à l’écoute, l’évaluation, l’orientation et l’intervention auprès des personnes en crise suicidaire.
  • Le service d’écoute nocturne Nightline propose une écoute bienveillante par des étudiantes et étudiants, ouverts dans plusieurs grandes villes.
  • Le service d’écoute et d’accompagnement Cnaé (Coordination nationale d’accompagnement des étudiantes et des étudiants) est dédié aux étudiants vivant des situations de mal-être, de violence ou de discrimination. Cette ligne est accessible gratuitement au 0 800 737 800 et disponible de 10 h à 21 h en semaine et de 10 h à 14 h le samedi.
  • Le numéro national 3018, gratuit, anonyme et confidentiel, conseille et oriente sur toutes les questions relevant des pratiques numériques et des risques associés : cyberharcèlement, contrôle parental, chantage à la webcam, exposition à des contenus violents et pornographiques, paramétrage de compte sur les réseaux sociaux, usurpation d’identité, etc.

Quelques repères

 

Bien dormir pour préserver sa santé

Pour préserver sa santé mentale et physique, il est important de veiller à son sommeil : les besoins de sommeil des adolescents sont de 8 h à 10 h de sommeil par nuit. Sur le plan des rythmes biologiques, les adolescents ont tendance à avoir un endormissement et un réveil plus tardifs. Pour avoir davantage de conseils sur le sommeil, consultez le site du réseau Morphée 

 

Développer ses compétences psychosociales et interpersonnelles

Pour aider les adolescents et jeunes dans cette phase de transition, il est nécessaire de les aider à développer leurs compétences psychosociales :  Les compétences psychosociales : l’essentiel à savoir et Les compétences psychosociales, de quoi parle-t-on ?

La pair-aidance : un nouveau pilier de la santé mentale des adolescents 

La pair-aidance correspond à l’entraide entre personnes souffrant d’une même maladie physique ou psychique, d’un même handicap ou d’une même expérience vécue. Elle s’impose aujourd’hui comme un levier essentiel pour comprendre et accompagner la santé mentale des adolescents. C’est dans cette dynamique que la France a développé un programme de développement du secourisme en santé mental dont le déploiement est assuré par l’association Premiers secours en Santé mentale.  

Inspiré du modèle australien, ce dispositif vise à outiller des citoyens capables de repérer les signaux faibles, d’écouter avec bienveillance et d’orienter vers les ressources adéquates celles et ceux qui traversent une détresse psychique. « Former aux premiers secours en santé mentale, c’est apprendre à prendre soin des autres », rappelle Muriel Vidalenc, responsable de l’association Premiers secours en Santé mentale, qui présente la démarche comme un véritable outil de transformation sociétale et de prévention primaire

Depuis 2018, la progression est fulgurante : de 800 secouristes formés en 2019, la France est passée à 174 000 au 1ᵉʳ janvier 2025 puis 195 000 au 1ᵉʳ avril, soit une augmentation d’environ 7 000 nouveaux secouristes par mois. Plus de 230 000 personnes ont déjà été formées, dont 11 % de jeunes, et 1 000 étudiants ont bénéficié de cette formation en 2024. 

Déployé auprès des adultes dès 2019, puis étendu aux adolescents en 2021, le programme s’enrichira en 2026 d’un module spécifiquement conçu pour le milieu scolaire, destiné aux élèves de 5ᵉ, 4ᵉ et seconde. L’objectif : faire émerger dès le collège une culture de pair-aidance, renforcer les compétences psychosociales des jeunes et leur permettre de devenir des acteurs engagés du bien-être collectif. Scientifiquement évaluée, cette approche contribue à changer le regard porté sur la souffrance psychique et à bâtir une société plus inclusive, où chaque jeune peut à la fois trouver du soutien et devenir un soutien pour l’autre.

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